Le mois de juin 2013 est riche en actions judiciaires intentées entre artistes. Après Scarlett Johansson contre Grégoire Delacourt, voici Orlan contre Lady Gaga.
Orlan est une artiste plasticienne qui s’est fait opérer plusieurs fois et poser des implants sous la peau du visage, au niveau des tempes.
Elle estime avoir ainsi créé un « univers marqué par l’hybridation » et que cet univers a été pillé par Lady Gaga dans son clip vidéo « Born this way » dans lequel elle apparaît comme une mutante possédant des excroissances sous la peau du visage et au niveau des épaules, qui serait trop proche de la sculpture Bumpload (1989).
Au-delà de son apparence, Orlan lui reproche également de s’être largement inspirée de certaines de ses œuvres notamment de Femme avec tête (1996).
Ces doléances étant notées, quel est le problème ?
Le fondement de l’action judiciaire d’Orlan est la contrefaçon.
L’article L335-3 du Code de propriété intellectuelle dispose que « Est également un délit de contrefaçon toute reproduction, représentation ou diffusion, par quelque moyen que ce soit, d'une œuvre de l'esprit en violation des droits de l'auteur, tels qu'ils sont définis et réglementés par la loi ».
Or, le droit d’auteur ne protège que les créations de forme et non les idées qui sont de « libre parcours ».
Orlan n’a donc pas le monopole de l’idée de se faire poser des implants sous-cutanés. Sur ce point, pas de débat. Elle n’a d’ailleurs, sauf erreur, jamais assigné le critique d’art genevois Etienne Dumont, également adepte des implants sous cutanés, ni Alexander Mc Queen dont le dernier défilé, Plato’s Atlantis en 2010, mettait en scène des mannequins portant des excroissances sur le visage.
En revanche, Orlan est titulaire d’un droit d’auteur sur toutes ses œuvres, y compris sur son visage si l’on considère qu’elle en a fait, au gré de ses opérations, une œuvre d’art, dès lors que certains critères sont remplis.
Pour bénéficier de la protection du droit d’auteur, il faut donc que l’idée ait été formalisée mais encore que l’œuvre ainsi créée soit originale, c’est-à-dire qu’elle porte « l’empreinte de la personnalité de son auteur ».
Attention, originalité ne signifie ni nouveauté ni beauté. Que l’on aime ou pas n’a aucune importance. L’esthétique est une notion bien trop subjective pour être prise en compte.
Ces critères s’appliqueront à toutes les œuvres quel qu’en soit le support, le mérite, la destination, le processus de création.
Les juges devront donc apprécier:
- D’une part, si les œuvres d’Orlan (y compris son visage) sont originales ;
- D’autre part, si le clip vidéo de Lady Gaga reproduit de trop près lesdites œuvres.
Certains blogueurs, fans de la chanteuse, s’insurgent contre l’action en justice d’Orlan en soulignant que le tableau d’Orlan « l’Origine de la Guerre » (1989)(http://exprmntl.fr/IMG/jpg/ORLANsite-2.jpg )
fait étrangement penser à « L’Origine du Monde » de Courbet (1866).
Le clin d’œil est évident. Pour autant, il ne saurait y avoir ici de contrefaçon. Deux raisons majeures s’opposeraient à toute action judiciaire :
(i) La durée de la protection des droits d’une œuvre sont la vie de l’auteur plus 70 ans après sa mort (Art. 123-1 al. 2 du CPI). Gustave Courbet est mort le 31 décembre 1877. Ses œuvres sont donc tombées dans le domaine public le 1er janvier 1948. Depuis cette date, l’œuvre appartient au patrimoine commun de l’humanité et tout un chacun peut l’utiliser (sous réserve du respect du droit moral, perpétuel) sans avoir à en demander l’autorisation ni à s’acquitter d’un quelconque montant.
Juridiquement, L’Origine de la Guerre est une œuvre dérivée de L’Origine du Monde et peut bénéficier à ce titre, si elle en remplit les critères, de la protection du droit d’auteur.
(ii) Nous eussions-nous trouvés dans le délai de protection de L’Origine du Monde, Orlan aurait pu arguer de la parodie, exception reconnue par l’article L122-5-4° du CPI : « Lorsque l'œuvre a été divulguée, l'auteur ne peut interdire : 4° La parodie, le pastiche et la caricature, compte tenu des lois du genre ; » (sous réserve de dénigrement de l’œuvre originale ou de risque de confusion).
Une seule question, dont la réponse ne sera pas de nature à compromettre son action judiciaire mais on se la pose quand-même, pourquoi Orlan a-t-elle attendu juin 2013 pour assigner Lady Gaga dont l’album et le clip vidéo sont sortis en février 2011 ?Cliquez ici pour modifier.
Orlan est une artiste plasticienne qui s’est fait opérer plusieurs fois et poser des implants sous la peau du visage, au niveau des tempes.
Elle estime avoir ainsi créé un « univers marqué par l’hybridation » et que cet univers a été pillé par Lady Gaga dans son clip vidéo « Born this way » dans lequel elle apparaît comme une mutante possédant des excroissances sous la peau du visage et au niveau des épaules, qui serait trop proche de la sculpture Bumpload (1989).
Au-delà de son apparence, Orlan lui reproche également de s’être largement inspirée de certaines de ses œuvres notamment de Femme avec tête (1996).
Ces doléances étant notées, quel est le problème ?
Le fondement de l’action judiciaire d’Orlan est la contrefaçon.
L’article L335-3 du Code de propriété intellectuelle dispose que « Est également un délit de contrefaçon toute reproduction, représentation ou diffusion, par quelque moyen que ce soit, d'une œuvre de l'esprit en violation des droits de l'auteur, tels qu'ils sont définis et réglementés par la loi ».
Or, le droit d’auteur ne protège que les créations de forme et non les idées qui sont de « libre parcours ».
Orlan n’a donc pas le monopole de l’idée de se faire poser des implants sous-cutanés. Sur ce point, pas de débat. Elle n’a d’ailleurs, sauf erreur, jamais assigné le critique d’art genevois Etienne Dumont, également adepte des implants sous cutanés, ni Alexander Mc Queen dont le dernier défilé, Plato’s Atlantis en 2010, mettait en scène des mannequins portant des excroissances sur le visage.
En revanche, Orlan est titulaire d’un droit d’auteur sur toutes ses œuvres, y compris sur son visage si l’on considère qu’elle en a fait, au gré de ses opérations, une œuvre d’art, dès lors que certains critères sont remplis.
Pour bénéficier de la protection du droit d’auteur, il faut donc que l’idée ait été formalisée mais encore que l’œuvre ainsi créée soit originale, c’est-à-dire qu’elle porte « l’empreinte de la personnalité de son auteur ».
Attention, originalité ne signifie ni nouveauté ni beauté. Que l’on aime ou pas n’a aucune importance. L’esthétique est une notion bien trop subjective pour être prise en compte.
Ces critères s’appliqueront à toutes les œuvres quel qu’en soit le support, le mérite, la destination, le processus de création.
Les juges devront donc apprécier:
- D’une part, si les œuvres d’Orlan (y compris son visage) sont originales ;
- D’autre part, si le clip vidéo de Lady Gaga reproduit de trop près lesdites œuvres.
Certains blogueurs, fans de la chanteuse, s’insurgent contre l’action en justice d’Orlan en soulignant que le tableau d’Orlan « l’Origine de la Guerre » (1989)(http://exprmntl.fr/IMG/jpg/ORLANsite-2.jpg )
fait étrangement penser à « L’Origine du Monde » de Courbet (1866).
Le clin d’œil est évident. Pour autant, il ne saurait y avoir ici de contrefaçon. Deux raisons majeures s’opposeraient à toute action judiciaire :
(i) La durée de la protection des droits d’une œuvre sont la vie de l’auteur plus 70 ans après sa mort (Art. 123-1 al. 2 du CPI). Gustave Courbet est mort le 31 décembre 1877. Ses œuvres sont donc tombées dans le domaine public le 1er janvier 1948. Depuis cette date, l’œuvre appartient au patrimoine commun de l’humanité et tout un chacun peut l’utiliser (sous réserve du respect du droit moral, perpétuel) sans avoir à en demander l’autorisation ni à s’acquitter d’un quelconque montant.
Juridiquement, L’Origine de la Guerre est une œuvre dérivée de L’Origine du Monde et peut bénéficier à ce titre, si elle en remplit les critères, de la protection du droit d’auteur.
(ii) Nous eussions-nous trouvés dans le délai de protection de L’Origine du Monde, Orlan aurait pu arguer de la parodie, exception reconnue par l’article L122-5-4° du CPI : « Lorsque l'œuvre a été divulguée, l'auteur ne peut interdire : 4° La parodie, le pastiche et la caricature, compte tenu des lois du genre ; » (sous réserve de dénigrement de l’œuvre originale ou de risque de confusion).
Une seule question, dont la réponse ne sera pas de nature à compromettre son action judiciaire mais on se la pose quand-même, pourquoi Orlan a-t-elle attendu juin 2013 pour assigner Lady Gaga dont l’album et le clip vidéo sont sortis en février 2011 ?Cliquez ici pour modifier.